Reprise après COVID-19 : Un reportage de la côte à la côte (d’Ivoire)

Les agriculteurs et agricultrices en Côte d'Ivoire avec leur recolte

En 2021, Radios Rurales Internationales entreprit d’aborder la relance postpandémique au moyen d’approches radiophoniques interactives pour promouvoir et améliorer 20 chaînes de valeur dans sept pays.

Ce fut, il va sans dire, un effort monumental.

Avec un budget de plus de 4,3 millions de dollars canadiens, ce fut le plus grand projet individuel jamais réalisé par Radios Rurales Internationales, et ce, complètement à distance.

Mais de quoi s’agissait-il exactement?

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Sous-titres disponibles en français et en anglais en cliquant sur CC et en choisissant votre langue dans les paramètres. 

Dans le contexte de la pandémie de COVID-19, les agriculteur.trice.s africains vécurent des situations aussi diverses que leurs pays de résidence. Certain.e.s subirent des confinements qui furent désastreux pour leur accès aux marchés. D’autres se demandèrent ce qui leur arrivait. Pouvait-on prévenir le COVID-19? Pouvaient-ils quitter leurs maisons pour aller s’occuper de leurs cultures?

Comme le raconte Vincent Phiri, un agriculteur malawite : « À cause du COVID-19, il était difficile de rencontrer physiquement des agents de vulgarisation. C’est pourquoi nous comptions sur la radio. »

La constance c’est que l’impact de la pandémie se fait sentir partout et que les projets de développement habituels, notamment ceux réalisés en face-à-face, et qui touchent les populations sur une base communautaire ou individuelle, ne pourraient plus être mis en œuvre. 

Grâce à un financement de la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) et en partenariat avec ses centres d’innovations vertes pour le secteur agroalimentaire, agissant au nom du ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ), Radios Rurales Internationales entreprit d’utiliser sa méthode éprouvée, la radio interactive, pour faire la différence. 

Le projet RELANCE a ciblé des cultures variant du baobab au Mozambique, au cacao en Côte d’Ivoire, de la mangue au Mali, à la féverole en Éthiopie. Nous avons examiné 20 différentes cultures et leurs chaînes de valeur connexes pour créer des émissions radiophoniques qui répondraient aux besoins du monde agricole de chaque pays, région et communauté. 

Nous avons travaillé avec 39 stations, en vue de les former sur la conception de campagnes radiophoniques participatives qui expliquent aux agriculteur.trice.s chaque étape du cycle agricole, y compris la production des denrées alimentaires, leur commercialisation et leur transformation. Nous avons appuyé 134 autres stations de radio avec des outils qui leur permettraient de produire elles-mêmes des émissions similaires, et nous les avons formées par le biais de cours en ligne, de guides et de ressources. 

Pour terminer, nous avons touché un auditoire potentiel de 17,8 millions de personnes.

Un.e agriculteur.trice touché.e, c’est un million d’agriculteur.trice.s touchés

Rose Konan et son mari Firmin cultivent du manioc et de la banane sur leur terre depuis 25 ans, et du cacao depuis 15 ans. Ils vivent à Yamoussoukro, en Côte d’Ivoire. 

Ils travaillaient au champ lorsqu’ils rencontrèrent pour la première fois des agent.e.s de leur station de radio locale, Voix de Lacs. Ces échanges les ont amenés à écouter les émissions radiophoniques. 

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« À la radio, on nous expliquait comment prendre soin de nos champs de manioc, faire du paillage, désherber et mettre l’herbe autour des souches, à défaut de quoi, lorsque les tubercules émergeraient, les animaux les mangeraient, » déclare Firmin.

Ce changement de pratique n’est pas un cas exceptionnel. Dans les sept pays, plusieurs agriculteur.trice.s ont rapporté avoir changé de pratiques ou prévu de changer de pratiques à cause des émissions radiophoniques. Dans certains pays, comme la Zambie, le Togo et le Mali, plus de 87 pour cent d’agriculteur.trice.s interrogés ont déclaré avoir adopté au moins une bonne pratique agricole. 

Et cela n’a pas fait une différence que pour les hommes. 

« On nous a appris à la radio que les femmes aussi pouvaient avoir leur plantation de cacao, » a déclaré Rose. 

Les émissions radiophoniques diffusées dans les sept pays ont abordé des défis spécifiques aux femmes, et les moyens par lesquelles les agriculteurs, hommes ou femmes, pouvaient œuvrer pour l’égalité des genres.

Globalement, plus de 80 pour cent des répondants, notamment les femmes, ont indiqué avoir acquis plus de connaissances sur les dispositions à prendre pour une amélioration de l’égalité des genres, y compris des choses comme la prise de décision conjointe par les membres de la famille lors de la sélection et la vente des denrées agricoles, et le partage équitable des charges agricoles.

Posez une question, obtenez une réponse

Si cela fait un moment que vous suivez Radios Rurales Internationales, vous saurez que l’interaction est un de nos termes préférés. 

Dans le cadre du projet RELANCE qui signifie beaucoup de choses pour nous, surtout qu’une émission radiophonique n’en est pas juste une. C’est un lieu où les agriculteur.trice.s peuvent appeler pour obtenir des réponses à leurs questions. C’est un outil de discussion communautaire. En effet, les groupes qui écoutent ensemble discutent de ce qui leur a plu ou déplu dans les émissions lorsqu’ils ont fini d’écouter. Cela signifie que les radiodiffuseur.euse.s peuvent s’assurer que les émissions qu’ils/elles mettent tant d’efforts à produire sont importantes et pertinentes pour leurs auditoires, et tout cela, par le biais d’un sondage téléphonique. 

Pour Benito Ndatsumba, originaire de Gondola, au Mozambique, cela signifie que ses questions concernant son exploitation de pois d’Angole obtiendront immédiatement des réponses de la part de spécialistes de ces cultures. 

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« Ça m’a aidé beaucoup, car de mon téléphone, j’appelle simplement, et je peux obtenir une réponse. J’ai appris beaucoup de choses telles que les techniques de production du pois d’Angole. »

Benito fait partie de près d’un million de personnes qui ont interagi avec les émissions radiophoniques dans les sept pays, soit une sur 84 000 au Mozambique. 

La radio produit des résultats, quel que soit l’enjeu

Il convient de répéter que 2021 n’a pas été une année normale. Non seulement ce projet est survenu dans une situation de pandémie mondiale, mais nos collègues éthiopiens ont travaillé dans un contexte de guerre civile naissante, réussissant à avoir un impact malgré le conflit. 

Quatre-vingt-douze Éthiopiens et Éthiopiennes que nous avons interrogés ont affirmé avoir appris beaucoup plus sur la santé et la protection contre le COVID-19 grâce au projet. Au Mali, le même pourcentage de personnes interrogées a déclaré avoir une meilleure connaissance des techniques pour commercialiser leurs produits agricoles et calculer leurs marges de profit grâce au projet. Il y a 88 % d’agriculteurs et d’agricultrices qui nous répondu avoir pris au moins une nouvelle mesure en faveur de l’égalité des genres. 

De plus, nous avons enregistré des résultats similaires spectaculaires ailleurs, mais qui bien évidemment varient en fonction du pays, de la communauté et la station de radio impliqués. En Zambie, quatre-vingt-treize pour cent des répondant.e.s ont déclaré avoir acquis une meilleure connaissance des bonnes pratiques agricoles, notamment des choses comme l’utilisation des bonnes semences ou le sarclage approprié. Au Togo, 83 pour cent de personnes ont affirmé avoir testé une nouvelle technique pour la commercialisation de leurs produits agricoles. 

Dans cinq pays (Mozambique, Mali, Togo, Côte d’Ivoire et Malawi), plus de 90 pour cent des personnes interrogées avaient écouté les émissions.

Les chiffres présentés ici proviennent de données collectées dans le cadre de deux types de sondage, dont une interview téléphonique virtuelle assistée par ordinateur (ITAO), et des enquêtes de ménages réalisées en personne dans des régions où la GIZ travaillait déjà sur les programmes de ses centres d’innovations vertes pour le secteur agroalimentaire. Bien que cela implique que nous ne puissions pas nécessairement extrapoler ces chiffres pour la population générale, cela n’amoindrit pas l’impact de ces émissions. 

« La radio est un bon outil, car si même si vous n’êtes pas instruit, vous pouvez apprendre seul, » déclare Francelina Jose. « Pour terminer, je dirai : continuons à cultiver, et écoutons tous les conseils que nous recevons. Il y a des avantages devant. »

Cela montre que la radio va loin. C’est un outil qui sert à toucher les groupes défavorisés lorsqu’il y a peu d’autres options. Et au bout du compte, ça marche.

À propos du projet :

Le projet RELANCE est un projet de 15 mois, et d’un montant de 2,9 millions d’euros (4,3 millions de dollars canadiens), réalisé en Côte d’Ivoire, en Éthiopie, au Malawi, au Mali, au Mozambique, au Togo et en Zambie, en vue d’encourager et de contribuer en toute sécurité à l’amélioration de la reprise agricole et économique, face à la pandémie du COVID-19, notamment à mesure que les pays et les économies commencent à rouvrir. Il est financé par les centres d’innovations vertes pour le secteur agroalimentaire de la Deutsche Gesellschaft für Internationale Zusammenarbeit (GIZ) au nom du ministère fédéral allemand de la Coopération économique et du Développement (BMZ)